Le billet de Simon Tivole France Inter
Ce matin, je vais vous parler du président de la République… - Encore ! disent déjà ceux qui ne le supportent pas… - Attendez, y a des choses à dire… On est en République !
Je pense que vous avez remarqué que Nicolas Sarkozy, ancien avocat, n’hésite pas à faire des procès, à en appeler à la justice pour trancher des histoires qui sont très différentes les unes des autres…
Il y a des gros morceaux, comme l’affaire Clearstream, et maintenant les carnets noirs de l’ancien patron des RG.
Et puis des choses moins graves, liées à son image ou à son statut politique. Par exemple, on le comprend : il veut faire interdire une poupée vaudou à son effigie, qui est vendue avec 12 épingles.
Dans un autre genre, l’an dernier, des étudiants de l’UNEF avaient fait une affiche sur les promesses de Sarkozy, ou on voyait le président faire un doigt d’honneur. Offense ! avaient dit les policiers. Mais les poursuites avaient été jugées
« inopportunes » par le procureur de la Rochelle, qui avait classé l’affaire sans suite.
Un autre délit est jugé cet après-midi en Mayenne…
A 14 heures, un homme de 56 ans, Hervé Éon, est attendu devant le tribunal correctionnel de Laval. C’est un militant de gauche, arrêté le 28 aout dernier. Au passage du cortège présidentiel, il a brandit une affichette en carton ou était écrit à la main : « casse toi pov’con ».
Il est donc jugé, aujourd’hui, pour « offense au chef de l’Etat », un délit puni d’une amende… de 45.000 € ! Ouah !
Pour un citoyen ordinaire, « casse toi pauvre con » ce serait de l’injure ou de la diffamation. Mais là, c’est le président qui est insulté… nuance ! Ce délit d’offense au chef de l’Etat (article 26 de la loi du 29 juillet 1881) était tombé en désuétude. Ni Giscard, ni Mitterrand, ni Chirac n’ont fait engager de telles poursuites, qui ressemblent bougrement à une survivance du crime de lèse-majesté…
- On comprend bien l’envie du président d’être respecté, comme homme, et dans sa fonction de chef de l’Etat… (D’ailleurs avec la crise il a pris une vraie dimension présidentielle).
- On comprend bien le besoin impérieux que le président de la République ne soit pas insulté à tout bout de champ. Mais les craintes de poursuites judiciaires sont-elles un bon moyen d’imposer le respect ? Et puis la liberté d’expression, ça existe…
Dans cette affaire, le ridicule le dispute au cocasse.
Car tout le monde se souvient que la réplique « Casse-toi pauvre con ! » est une citation du président Sarkozy, énervé, au salon de l’agriculture par un homme qui ne voulait pas lui serrer la main et l’avait envoyé paître.
Si le procureur de Laval tient absolument à manger les oursins avec les doigts, on peut lui suggérer une petite explication de texte… Analysons l’offense : le président est-il pauvre ? Non, on l’a su quand son patrimoine a été rendu public. Le président est-il con ? Non : c’est une évidence. Son épouse dit même qu’il possède 5 ou 6 cerveaux remarquablement irrigués… Alors…
Conclusion : « Plus grand est l’offensé… et plus grande est l’offense. »